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Vincent Vallières 2021

Vincent Vallières, Mats Naslund, ma blonde et moi

Revue du concert de Vincent Vallières à la Cinquième salle de la Place-des-Arts, à Montréal, le 9 décembre 2021.

 

Heille Vallières, tu m’as fait pleurer ce soir. Tu m’as eu en parlant de ta blonde qui a cru en toi alors que tu vivais des échecs. Ta voix a légèrement craqué, on l'a senti. Tu m’as eu en parlant de ton gars, qui joue sur la patinoire, comme tu le faisais, dans le noir de l’hiver. Tu m’as eu en parlant des faces ridées pleines d’histoires que ma blonde et moi, son chum, auront dans quelques années, nous qui ne devons rien à personne. Tu m’as eu quand t’as fait défiler ma vie devant mes yeux, quand t’es remonté jusqu’à nos aïeux. Tu m'as eu parce que je suis comme toi.

 

Tu m’as fait rire, aussi, Vallières! Je les connais tes chums qui aiment le vin de qualité, tes voisins de l’autre bord de la haie de cèdre. Moi non plus, je n’oublierais pas mon cas’ de Mats Naslund pour rien au monde si j’en avais un, ni l’image de ma grand-mère, ni la sueur de mon grand-père. Je vis aujourd’hui juste à côté de l’usine où il a travaillé toute sa vie. Les temps ont changé. Les condos ont remplacé l’usine. J’apprécie la qualité (!) de vie qu’on a aujourd’hui.

 

Tu m’as aussi ramené sur terre, Vallières. C’est vrai que chaque feuille blanche peut devenir un paysage immense, que ce soit un dessin ou une histoire, ou tout ce qu’on peut faire de ses mains et de son imagination. Tout est possible. C’est vrai qu’on oublie trop souvent que chaque journée qui commence est en soi une nouvelle chance. J’ai des proches qui n’en vivent plus, des nouvelles journées. On réalise pas ça, chaque matin quand on part travailler.

 

Ma blonde n'est pas d'ici, Vallières. Mais tu as tellement bien dépeint notre gang, notre enfance, nos grands-parents, notre histoire, qu'elle nous a saisis. Elle a vu ta Grand-mère élever ses sept enfants au bord du pit, à Asbestos. Elle a compris de quoi on est faits, qu'on vient du moulin, de la mine, ou du vacarme de l'usine. On a la parole modeste, c'est vrai, mais ça nous empêche pas d'inventer des merveilles. Pas pour rien qu'elle a choisi de faire sa vie ici.

 

Je la connais cette fille dont la lueur vacille, qui a peur de tout le boucan à l’intérieur. Je travaillais avec. Je l’ai vue se retirer de sa job pendant des mois. Je l’ai vu s’isoler, se perdre, puis lentement se retrouver. Je l’ai vue se relever, loin du centre-ville, moins fragile. Debout et fière, une cicatrice de plus à l'âme. Le reste du monde n’a pas bronché et a continué de tourner.

 

Non, toute beauté n'est pas perdue. Elle est dans les moments que tu observes, que tu captes et que tu nous ressers en chanson ou en mots sur tes réseaux sociaux.

 

Enweille Vallières, retourne à guit’ pis ton crayon et gosse-moi une autre chanson. Prends la 12 cordes de Richard Séguin qui en contient encore plein de belles. Parle-moi des arbres et des ruisseaux. Raconte-moi les livreurs de caisses de bière, pis les Expos. D’où c’qu’on vient et où c’qu’on s’en va.

 

Heille Vallières, merci pour ton show ce soir, à la Cinquième salle de la Place-des-Arts. Sérieux, c’était super bon! J’ai hâte qu’on danse comme des cons, perdus dans le beat et dans le bruit, au lieu d’être masqué et assis. Ça viendra. Ça ira, ça ira. Ma blonde et moi, on a passé une super belle soirée. On s'est tenus la main, on s'est regardés. T’écouter chanter et raconter tes histoires était comme passer la soirée avec un chum (de qualité!) qu'on connaît depuis toujours et qu'on aime. Merci et à bientôt! 

(texte initialement paru sur QUB musique, le 10 décembre 2021)

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